Lorsque nous pensons aux demandes, nous sommes nombreux à les voir en terme de « faire faire des choses »; c’est à dire poser des « demandes d'action ». Et, de fait, cette première catégorie de demande est une clé pour nous construire une vie plus belle, plus bienveillante. Cela dit, il existe une autre forme de demande qui nous permet de rendre nos «demandes d'action» plus efficaces et plus utiles à la vie - je nomme cette deuxième catégorie les «demandes de connexion».
Qu'est-ce que la connexion, en fait ?
Nous pouvons considérer la «connexion» entre deux personnes (ou plusieurs) comme l'existence simultanée de quatre facteurs.
1) Je comprends mes sentiments et mes besoins et je peux en parler.
2) L'autre personne comprend mes sentiments et mes besoins et peut en parler . (S'il s’agit de plusieurs personnes, elles peuvent comprendre et parler de mes sentiments et mes besoins)
3) L'autre personne comprend ses propres sentiments et ses besoins et peut en parler. (S’il s’agit de plusieurs personnes, elles comprennent leurs sentiments et leurs besoins)
4) Je comprends les sentiments et les besoins de l'autre personne et je peux en parler. (Je comprends ceux des autres personnes, si elles sont plusieurs)
J'ai constaté qu’à chaque fois que ces quatre facettes sont réunies, alors, immanquablement, la compassion s'épanouit. Quelque chose de beau, presque magique, se produit lorsque la compréhension atteint cette ampleur.
C’est pourquoi avoir la conscience de ces quatres composantes et développer la capacité à les créer est incroyablement puissant pour pouvoir passer d'un «état déconnecté» à un «état connecté ». C'est lorsque nous voulons atteindre un tel niveau que les «demandes de connexion » entrent en jeu.
Qu'est-ce qu'une demande de connexion ?
Une demande de connexion est une demande qui vise à améliorer la qualité de notre connexion avec les autres (et parfois même avec nous-mêmes). Car comment pouvons-nous faire preuve de compassion lorsque nous discutons ou demandons des choses à des personnes dont nous ne connaissons pas les besoins, et qui ne connaissent pas les nôtres ? Pour y voir plus clair, utiliser des demandes de connexion nous permet d’accroître la conscience de la connexion que nous établissons.
Nous pouvons considérer que la «qualité de la connexion» se manifeste à différents niveaux. Nous pouvons utiliser les demandes de connexion pour passer d'un niveau à l'autre, jusqu'à ce que nous atteignons un état que nous pouvons appeler «connexion totale».
Niveau zéro
Le niveau zéro consiste à savoir si la personne avec laquelle nous souhaitons nous connecter a envie de nous parler ou d'écouter ce que nous avons à dire. Cela peut ressembler à : «Tu serais prêt à parler du dîner ? (Je me demande)». Après tout, parler à quelqu'un qui n’a pas envie d’écouter, c'est comme pousser sur une corde. Cela ne mène nulle part.
Niveau un
Une fois que nous sommes d'accord pour parler, le niveau un commence par l’une des personnes qui entend ce que l'autre dit. Nous pouvons savoir si quelqu'un a entendu ce que nous avons dit en demandant un retour ou un reflet. Cela peut ressembler à : «Je veux m'assurer que j'ai été clair - serais-tu prêt à me dire ce que tu m'as entendu dire ?». En effet, si la personne qui «écoute » n'a pas entendu ce que nous avons réellement dit, quel lien est-il possible d'établir ? A mon avis, pas grand chose ou même pas du tout.
À ce niveau-là, ce qui me surprend c'est la fréquence à laquelle nous pensons que les gens entendent ce que nous avons dit, alors qu'en fait, non. Si vous commencez à vérifier cela par vous-même, je pense que vous aurez vous aussi des surprises.
Je me souviens du jour où j'ai découvert cette idée, il y a quelques années. J'ai immédiatement commencé à demander à mes enfants s'ils étaient prêts à me dire ce qu'ils m'avaient entendu dire. Dans 80 % des cas, j'ai obtenu la réponse suivante : «Tu peux répéter, papa ?». Je me souviens de mon choc à l’idée que mes enfants n'avaient probablement pas entendu 80 % de ce que je leur avais dit au cours des 16 années précédentes! Cela expliquait beaucoup de choses (sourire en coin).
Niveau deux
Quand nous nous sommes assurés que l'autre personne a bien entendu ce que nous avons vraiment dit, nous pouvons commencer à comprendre ce qui est vivant en elle, comment elle réagit à ce qu'elle nous a entendu dire.
Une demande de connexion de niveau deux pourrait ressembler à «Merci de m'avoir entendu. Je suis curieux, maintenant que tu as entendu ce que je viens de dire, serais-tu prêt à me dire ce qui se passe pour toi?». Ce qui fait toute la différence à ce niveau, c’est de pouvoir découvrir les sentiments et les besoins de l’autre - pas seulement ses mots.
Niveau trois
Le niveau trois consiste à s'assurer que nous comprenons ce qui a été exprimé au niveau deux. Cela peut ressembler à ceci : «J'aimerais être sûr de te comprendre. Puis-je te le refléter pour en être sûr?». Ou «Je crois que j'entends « ______ ». Est-ce exact? Est-ce que c'est bien ça?» . Si vous obtenez un «non » à ce stade, retournez au niveau deux. Si vous obtenez un «Oui », vous êtes prêts à continuer.
Refléter ce que l’autre personne a dit est également utile pour moi, surtout si je remarque que je me sens « stimulé » (emporté par mes émotions) ou que je commence à perdre ma disponibilité. Refléter m'aide à retrouver ma capacité à être présent.
Niveau quatre
Le niveau quatre complète le cycle initial d'un dialogue. C'est le moment où nous partageons ce qui se passe en nous, maintenant que nous avons entendu ce que l'autre personne ressent et ce dont elle a besoin après nous avoir entendus.
Cela pourrait ressembler à ceci : « Je me demande si vous avez la place d'entendre ce qui se passe pour moi, maintenant que je comprends ce qui se passe pour vous.»
Ce cycle de compréhension peut se poursuivre aux niveaux cinq, six, sept et plus, jusqu'à ce que nous atteignons cet endroit que nous appelons «connexion» ou «compréhension par le cœur » ou «conscience des besoins».
Lorsque nous maîtrisons cette compétence qui consiste en somme, à ralentir, à réfléchir, à s’assurer de l’écoute, à demander un reflet et en fin de compte, à accroître notre connexion avec les autres, nous nous retrouvons dans des relations avec moins de bagarres et plus de dialogues. En cas de conflit, c'est une façon de s'engager dans le dialogue tout en gardant notre compassion intacte.
C'est aussi la façon dont nous préparons le terrain pour les demandes d'action. J'en ai fait l'expérience bien souvent : dans cet état de «connexion» et de compréhension bienveillante, les demandes d'action semblent tomber du ciel.
Et oui, c'est très stimulant et cela nous demande d'être capable d'auto-empathie, d'empathie, de ralentir, d'auto-empathie encore, d'empathie encore et ainsi de suite - jusqu'à ce que nous ayons terminé. Le fait est que cela fonctionne.
La suite dans les prochaines semaines du cours de compassion
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