#47 - 25 septembre 2020

Remettre l’innovation sur la route du progrès

Un saut de presque dix ans en arrière suffit à s’en rendre compte : le visage de la mobilité urbaine n’est plus le même. Cette dernière décennie a été marquée par l’arrivée de nouveaux acteurs issus du numérique, qui, à grand renfort de flottes de véhicules, se sont faits une place dans un secteur historiquement figé. Dans les métropoles, trottinettes, vélos en libre-service, transports en commun, automobiles et covoiturage forment désormais un bouquet de solutions de mobilités accessibles. Toutefois, si les modes évoluent, les enjeux restent et s’expriment avec une acuité plus forte que par le passé.

Aussi, lorsque l’on parle de cette mobilité de demain, il faut être sûr d’une chose : le principal impératif, à la différence de ce que l’on a pu voir par le passé, n’est plus la vélocité mais bien la durabilité des modes de transports et en particulier la réduction de l’empreinte carbone de la mobilité à l’échelle mondiale. L’enjeu et la marge de progrès sont conséquents. Le secteur des transports représente aujourd’hui près du quart des émissions de gaz à effet de serre à l’échelle mondiale (environ 24,5% selon l’Agence Internationale de l’Énergie). En Europe, une analyse sectorielle des émissions de CO2 permet de constater que les transports sont le seul secteur à avoir vu leur niveau d’émissions augmenter entre 1990 et 2014.

Ces innovations permettront-elles d’apporter une réponse efficace à l’enjeu de réduction des émissions de CO2 de la mobilité ? Une récente étude de l’International Transport Forum a mis en lumière, à partir d’une analyse en cycle de vie, les performances des nouvelles formes de mobilités en matière d’émissions de CO2. Verdict : les nouveaux modes issus du numérique peinent à faire mieux que les transports collectifs. De l’autre côté du spectre, les VTC et taxis sont les modes les plus émissifs. Et, si de récentes promesses visant à électrifier tout ou partie des flottes de VTC dans certaines grandes villes vont dans le sens d’une tentative de réduction de leur empreinte carbone, ces efforts ne permettront pas de ramener les émissions de ces services au niveau des transports collectifs… ou même de l’automobile thermique. Aussi, l’un des principaux leviers pour réduire l’empreinte carbone des véhicules motorisés (hors micro-mobilité) réside dans un facteur simple, bien que compliqué à mettre en place : l’augmentation du nombre de passagers transportés.

Remettre les innovations sur la route du progrès en matière de décarbonation des mobilités nécessitera davantage que l’attendue transition énergétique du parc de véhicules. L’approche high-tech, nécessaire car porteuse de solutions nouvelles, doit être complétée par une approche nouvelle. L’ITF le montre ainsi dans son récent Transport Climate Action Directory : la décarbonation des mobilités répond à une stratégie bien plus complexe. Soyons sûrs d’une chose : technique et technologie ne peuvent être la seule réponse aux enjeux de mobilité. Ces derniers nécessitent une approche systémique et des actions sur le soft (formation, éducation), comme sur le hard (services, infrastructures, etc.) ; grâce à des outils high (plateforme de mise en relation, tarification dynamique, etc.) comme low tech (aménagements, etc.). – Camille Combe, chargé de mission

 

Pas le temps de lire ? L’équipe de La Fabrique de la Cité s’occupe de vous.

PARTENAIRE PARTICULIER – Au lendemain d’une décision de la Cour de justice de l’Union européenne validant la législation française en matière de location touristique, Airbnb a annoncé vouloir renforcer sa coopération avec les villes. Celles-ci pourraient désormais bénéficier d’un accès élargi aux données de la plateforme pour leur permettre de mieux ajuster leurs politiques de logement et de tourisme. En filigrane se dessine l’enjeu de la donnée comme ressource clef pour les villes. – Romain Morin, assistant de recherche

→ Et sur le même sujet : notre interview d’Antoine Courmont, chercheur en science politique et responsable scientifique de la chaire Villes et numérique de Sciences Po, au sujet de la gouvernance de la ville par et avec les données.


PAS DE BAGUETTE MAGIQUE – La manière de construire un bâtiment pèse pour 80% dans son bilan carbone. L’utilisation accrue du bois, aux excellentes capacités de stockage du carbone, serait-elle la solution ? Loin s’en faut : la production est insuffisante et le restera. Limiter les émissions exige de soutenir l’innovation dans tous les secteurs des matériaux de construction, sous peine, en imposant le bois comme l’alpha et l’oméga de l’enjeu carbone, de réserver la ville bas-carbone à une élite. – Chloë Voisin-Bormuth, directrice de la recherche et des études

→ Et sur le même sujet : notre projet d’étude sur la ville post-carbone.


ÉTÉ CALIFORNIEN
L'été 2020 a fait payer un lourd tribut à la Californie, entre crise sanitaire, feux de forêt et perturbation de son industrie touristique. Les villes se sont partiellement vidées et les zones rurales attirent autant – voire plus – qu’auparavant. – Sarah Cosatto, chargée d’études


MOBILITÉ RÉSIDENTIELLE VS. MOBILITÉ PROFESSIONNELLE – En France, le spectre d’un exode urbain post-Covid a fait couler beaucoup d’encre. Qu’en est-il réellement ? « Cette envie d’ailleurs ne coïncide pas toujours avec la réalité », rappellent Les Échos : pour de nombreux ménages, la diminution du nombre d’offres d’emploi retarde le passage à l’acte, de même que l’aversion au risque, accrue en temps de crise. – Marie Baléo, responsable des études et des publications

→ Et sur le même sujet : notre édito « Logement : il faut que tout change pour que rien ne change ». 


AVOIR L’AIR À L’ŒIL
L’entreprise Esri, spécialiste de cartographie SIG, vient de lancer l’application Air Quality Aware. Utilisant des données fédérales, elle fait état de la qualité de l’air à un moment précis et comment celle-ci pourrait évoluer. Selon Dan Pisut, Environment Content Lead chez Esri, l’application pourrait permettre aux villes « d’adapter leurs efforts en matière de santé publique ». – Sarah Cosatto

→ Et sur le même sujet : retrouvez bientôt notre rapport sur les villes productrices de santé.

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