#29 - 15 mai 2020

S.O.S d’une mobilité en détresse

À en juger par les images du canal Saint-Martin à Paris, déconfinement rime, pour certains, avec soulagement. Pour d’autres, tels les opérateurs de transports publics, le casse-tête continue à mesure que le confinement s’assouplit à travers le monde et que les déplacements reprennent. L’équation est complexe : si le besoin de transporter un grand nombre de personnes existe toujours, il faut désormais permettre aux usagers d’être suffisamment distants les uns des autres. Ce nouveau paradigme paraît contre nature pour des acteurs dont le métier historique est de transporter un grand nombre de personnes (aussi parle-t-on, outre-Atlantique, de mass transit). Rappelons également qu’avant la crise, le RER A parisien transportait jusqu'à 640 000 voyageurs aux heures de pointe, soit plus que la population entière de la ville de Lyon.

Les transports collectifs souffriront certainement beaucoup de la crise que nous traversons. Comme l’indiquait Brad Lander, conseiller municipal de New York dans une récente tribune, les transports en commun ont été considérés par beaucoup, et à tort, comme l’un des principaux facteurs de transmission du virus, au point d’inciter certains usagers à se tourner vers l’automobile, perçue comme plus sûre en temps de pandémie. Selon Brad Lander, il convient au contraire de ne pas abandonner les transports collectifs mais plutôt de leur permettre de continuer à jouer leur rôle essentiel de transport des citadins dans un contexte de relance urbaine. Dès lors, comment repenser le fonctionnement optimal des transports publics en temps de pandémie ?

Des pistes apparaissent d’ores et déjà, qui consistent tout d'abord à reprogrammer la mobilité. Pour l’heure, le report modal est encouragé par l’emploi de l’urbanisme tactique et le déploiement de pistes cyclables temporaires. S’agissant des transports collectifs, plusieurs leviers ont été identifiés. D’une part, pour rassurer les usagers, les opérateurs assurent une aseptisation et un nettoyage accru du matériel roulant. D’autre part, le maintien d’une offre significative doit permettre d’assurer une fréquence importante à un moment où la demande demeure faible. Ces stratégies ont pour dénominateur commun de se concentrer sur l’offre. Et si le temps était venu d’agir sur la demande ? Une relance efficace des transports collectifs ne pourra faire l’économie d’une action pérenne visant à lisser les pics de demande et rendre ainsi possible la distanciation physique.

Les solutions sont nombreuses et complexes. Les villes devront coopérer avec les employeurs afin d’organiser le télétravail à l’échelle du bassin de vie et répartir les horaires de prises de postes pour éviter l’engorgement des transports. Deuxième solution, agir sur le signal prix de la mobilité de manière dynamique, comme pourrait le faire Singapour, pour réduire la demande de déplacements aux heures de pointe et favoriser ainsi l’effacement de la demande. Cette dernière solution permet par ailleurs d’apporter une réponse à un autre grand chantier qu’ouvre la crise actuelle : celui du financement d'une mobilité urbaine décarbonée et résiliente. – Camille Combe, chargé de mission

→ Retrouvez notre projet de recherche sur le financement de la mobilité dans un monde post-carbone, qui donnera lieu à la publication d’un rapport le 28 mai prochain.

 

Pas le temps de lire ? L’équipe de La Fabrique de la Cité s’occupe de vous.

PROSPECTIVE – « Pour les villes, pour les territoires, la mobilité est un élément d’attractivité c’est-à-dire de création d’emplois, de capacité à être relié, à être connecté. En conséquence, ce n’est pas la réduction des mobilités qui fait sens, de mon point de vue, mais bien d’imaginer tous les moyens possibles pour les améliorer » : Pierre Aubouin interroge Anne-Maric Idrac, Haute responsable pour la stratégie nationale du véhicule autonome et présidente de France logistique, sur les enjeux de la mobilité à l’horizon 2030. Marie Baléo, responsable des études et des publications

 

GAME OVER – Nous vous l’annoncions la semaine dernière : le très contesté projet de quartier intelligent de Sidewalk Labs à Toronto ne verra pas le jour. Cécile Maisonneuve, présidente de La Fabrique de la Cité, revient dans les Échos sur les raisons de cet échec : « politiquement, cela a été une grosse erreur, parce que la culture canadienne est différente de celle des États-Unis. Cela s'est cristallisé sur la question des données : il y a un fossé entre la philosophie californienne, presque libertarienne, et la philosophie canadienne, très axée sur la protection des personnes ». Marie Baléo

→ Et sur le même sujet : notre portrait de ville de Toronto, rédigé dans le sillage de notre expédition urbaine de septembre 2019.


BOOM LOGISTIQUE
En Suisse, les acteurs locaux et internationaux de l’e-commerce ont, pour certains, vu la demande de services de livraison monter en flèche. Anticipant une « augmentation des capacités à long terme », ils ont ouvert de nouveaux centres de distribution et mis en service de nouvelles navettes dans leurs centres logistiques. Une évolution qui rappelle la nécessité de penser, de façon intégrée et sur le temps long, l’aménagement de l’infrastructure logistique. Sarah Cosatto, chargée d’études

→ Et sur le même sujet : nos trois scénarios pour l’avenir de la logistique urbaine.

 

CLAUSTROPHOBIE – Le confinement a révélé les inégalités de logement, exacerbant le mal-être induit par la sur-occupation, l’isolement ou encore l’absence de connexion à Internet. Futuribles s’interroge sur les conséquences qu’emportera cet épisode particulier sur la demande de logement des Français ; France Culture n’hésite pas à qualifier la question du logement de « bombe à retardement ».  Marie Baléo

 

ANTICIPER – Dans une note publiée le 11 mai, Terra Nova prévoit la multiplication des crises économiques, sanitaires ou environnementales et identifie trois défis pour des politiques publiques territoriales résilientes. Marie Baléo

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