de Kamel Daoud
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Gallimard ~ 23.00€
Un grand roman, indispensable et courageux !
"Je cache l'histoire d'une guerre entière, inscrite sur ma peau depuis que je suis enfant. Ceux qui savent lire comprendront en croisant le scandale de mes yeux et la monstruosité de mon sourire. Ceux qui oublient volontairement auront peur de moi et de me regarder."
Celle qui parle, c'est Aube, une jeune algérienne habitant le quartier Miramar à Oran, en Algérie. Dans sa langue intérieure, riche et rapide comme un serpent, elle s'adresse à l'enfant qu'elle porte en son ventre, sa Houri comme elle dit, persuadée que c'est une petite fille. Ses yeux à la beauté exceptionnelle contrastent avec son terrible sourire, une cicatrice, témoignage de la décennie noire algérienne (1992-2002) dont il est strictement interdit de parler sous peine d'amende et d'emprisonnement.
Muette, rescapée d'une tentative dégorgement et rare survivante du massacre de Had Chekala alors qu'elle n'avait que 5 ans, gagnant sa vie désormais avec son salon de coiffure et vivant libre, comme l'entend, Aube est la personnification d'une voix qui refuse de taire un chapitre sanglant de l'Histoire et d'oublier ses morts et ses victimes, et qui dénonce la condition des femmes en Algérie, avec ce patriarcat omniprésent, étouffant et humiliant.
Kamel Daoud signe un texte fort, bravant la loi qui interdit depuis 2005 d'évoquer la guerre civile algérienne, et se dressant face aux menaces de mort qui le feront pas taire.
Et si la littérature ne permet pas toujours de sauver, elle est l'arme ultime pour qui veut faire éclater une vérité.
Caroline
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