«Je pense que mon travail consiste à observer les gens et le monde, et non à les juger. J'espère toujours me positionner loin des soi-disant conclusions. Je voudrais tout laisser grand ouvert à toutes les possibilités du monde».
- Haruki Murakami
Comme je l'ai raconté à la semaine 2, le petit être en pleine croissance que j’étais a appris à se comporter par référence à des jugements, comme la plupart d'entre nous. On m'a appris à faire certaines choses parce que c'était «ce qu’il était de bon de faire», à ne pas faire d'autres choses parce que ce n’était «pas bien». J'ai appris que si je me comportais d'une certaine façon, je serais considéré comme «quelqu’un de bien» tandis que si je me comportais d'une autre façon, je serais considéré comme «quelqu’un de mauvais». J'ai également appris que je «devais» faire certaines choses alors que d’autres, je «ne devais pas» les faire.
En grandissant dans un environnement de ce type, j’ai constaté que les jugements m'ont aidé à m'intégrer socialement. Ils m'ont permis non seulement de m'intégrer, mais de rester en sécurité et de comprendre les fonctionnements de la société. Cependant, ils ne m'ont pas toujours aidé à développer un sentiment d'appartenance ou de compassion.
J'ai appris que moi (et d’autres) pouvions être considérés comme «stupides», «égoïstes», «paresseux» ou tout autre jugement. Ces termes ont contribué à me motiver (par la peur) pour que je me comporte comme il fallait. Et même si j'y parvenais, cela ne m'a pas beaucoup aidé à ressentir de la connexion ou de la compassion. On m'a appris à ne pas m'aimer, voire à me détester.
Quel est le rapport entre les jugements et les observations ou la compassion?
Comme nous l'avons déjà dit, avec de la pratique, nous pouvons apprendre à traduire nos jugements, à découvrir nos besoins. Il y a des besoins liés à chaque jugement, et lorsque nous les identifions, cela nous donne une chance d'avoir plus de connexion dans nos conversations. Je dis que c’est «une chance» parce que la prise de conscience de nos besoins est la première étape vers une conversation «connectée».
La deuxième étape consiste à être capable de s'exprimer d'une manière qui reflète notre intention. Comment pouvons-nous parler des situations, des événements et des personnes de notre vie sans utiliser ces mêmes mots, les mêmes jugements avec lesquels nous avons grandi? Nous pouvons utiliser l'observation.
L'observation est un «substitut» que nous pouvons utiliser lorsque nous voulons faire passer notre conscience et nos conversations du jugement à la connexion et à la compassion. C’est une façon neutre et sans jugement de penser et de parler de quelque chose que j'ai fait ou que quelqu'un d'autre a fait. Lorsque je n'arrive pas à seulement observer, c’est que j'ai probablement besoin de plus d'empathie pour parvenir à une compréhension plus claire de mes besoins et de l'événement (ou des événements) réel qui est en cause.
Imaginez, pour prendre un exemple, que je dise à un ami : «Dis donc, tu te rappelles hier, quand tu me criais dessus et que tu te plaignais pour tes clés de voiture?» Mon ami pourrait facilement répondre : «Je ne criais pas! J'étais juste emphatique». Comme vous pouvez le prévoir, cette conversation va facilement se transformer en un débat sur la «façon» dont il parlait... et non sur ce qui a été dit, ou sur la façon dont les choses se sont passées ensuite.
Imaginez maintenant que je dise : «Écoute. Tu te souviens quand on parlait du fait que j'ai perdu les clés de ta voiture hier?» Il est beaucoup plus probable que mon ami sera en mesure de se concentrer sur l'événement réel et de s’engager dans une conversation plus connectée.
Comment puis-je être sûr que je fais une observation?
Une question que je me pose pour savoir si j'observe ou si je juge est la suivante : «Pourrais-je enregistrer cela en vidéo ou le mettre par écrit?». Dans notre exemple ci-dessus, «crier» et «se plaindre» sont des termes subjectifs, une évaluation personnelle. Oui, nous pourrions saisir qu'un niveau sonore élevé a été utilisé, bien qu'il soit un peu difficile de dire «lorsque tu parlais à 25 décibels...»
Le ton de la voix
Au sujet de l'observation, il est difficile d'expliquer ce que nous entendons par un ton de voix particulier. Comment observe-t-on que quelqu'un semble agité, en colère ou frustré? Ce sont souvent des choses que l'on détecte par le ton, non?
Les meilleures façons que j'ai apprises pour rester en «mode observation» tout en exprimant ce que je pense entendre dans la voix sont les suivantes :
1) Poser la question. Par exemple : «dis-moi, es-tu vraiment frustré que j'aie perdu les clés de ta voiture?»
2) Observez votre réaction. Parfois, j'ai l'impression que quelqu'un est «condescendant» ou «sarcastique». Ce ne sont pas là des mots qui font partie du vocabulaire de l'observation, et pourtant je veux aborder ce qui se passe en moi, créer un espace d'auto-empathie pour traduire mon interprétation en besoins et en demande. Dans ce cas, je peux observer que j'ai une réaction en moi au ton employé. «Je remarque que j'ai une réaction au ton de ta voix et que j'ai du mal à entendre ce que tu dis en ce moment. Pourrions-nous prendre une minute pour faire le point ou faire une pause?» (Voir aussi la semaine 12 - Ralentir)
Je sais que cela ne fonctionnera pas toujours parfaitement, car je ne peux jamais contrôler la façon dont quelqu'un va réagir à mon égard. Je peux seulement savoir que je fais du mieux que je peux pour arriver à un endroit où je suis connecté à l'autre et continuer à partir de là. Parfois, je peux simplement entendre la douleur de l’autre et, ce faisant, le ton de ce qui est dit devient moins important pour moi et me permet de comprendre,de rester connecté ou de me reconnecter à eux.
La suite dans les prochaines semaines du cours de compassion
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