Bonjour à tous,

Une newsletter et toujours pas de nouvel épisode à diffuser... 

Peut-être parce que j'avais oublié à quel point le mois de septembre est souvent intense!

Finalement ça tombe bien parce que vous allez avoir le temps d'écouter le  magnifique podcast de Samia Basille, qui parle aussi d'inclusion, d'école, et de handicap.

Bonne lecture et bonne écoute,

Ce podcast, c'est l'histoire de Damien, un garçon de CM2 qui a des troubles des apprentissages, des difficultés d'attention et qui fait surtout de très grosses crises de colère à l'école..

Samia Basille, la réalisatrice de ce podcast, n'avait pas du tout l'intention, au départ, de faire un documentaire sur le handicap. elle s'intéressait plutôt à la vie d'une école. Et pourtant, le sujet du handicap s'est imposé assez vite avec le diagnostic de Damien, l'un des élèves de la classe.

On ne sait pas quelle est la nature précise du diagnostic, mais ça n'a pas tellement d'importance finalement, car ce podcast raconte un parcours qui pourrait être celui de beaucoup d'enfants à besoins spécifiques.

La journaliste a suivi cet enfant pendant deux ans, d'abord à l'école puis au collège. Elle fait entendre avec beaucoup de justesse, la Directrice et l'enseignante qui essaient de trouver des solutions, l'AESH volontaire mais dépassée, les parents souvent bien seuls face à l'institution, l'enseignante référente, la Directrice de la MDPH et même Sophie Cluzel...

Les parents concernés ou les professionnels du handicap n'apprendront peut-être pas grand-chose de nouveau... Le manque de formation et de moyens des enseignants, la lourdeur des procédures administratives, le désarroi des parents, la solitude des AESH, le manque de place dans les ULIS, les inégalités sociales qui s'ajoutent au handicap, le poids de l'institution face aux familles concernées, tout ça est connu de la plupart d'entre nous.

Mais tout l'intérêt de ce podcast c'est justement, d'être réalisé par une journaliste qui ne connaissait pas le monde du handicap et qui arrive dans cet univers, vierge de toute idée préconçue .... Samia découvre au fil de son reportage, la complexité d'une telle situation pour les parents comme pour les enseignants, et on perçoit, à travers son regard parfois un peu perplexe, le chemin tortueux de l'inclusion scolaire.

Pas de manichéisme dans ce documentaire. On voit à quel point, sur le terrain,  l'équipe enseignante (en élémentaire en tout cas) cherche des solutions, se trompe parfois mais au moins essaie. On entend l'impuissance des parents, l'envie de soutenir leur enfant, avec maladresse parfois. Et on entend aussi les discours plus formatés des représentants de l'institution qui font parfois grincer des dents... 

Le ton est juste, le sujet est fouillé (Samia a passé près de 2 ans sur le terrain) et la journaliste enregistre Damien avec beaucoup de respect et de délicatesse pour ne pas le stigmatiser et lui laisser son libre arbitre. Elle m'a d'ailleurs confié que Damien et sa famille ont adoré le podcast.

Samia Basille n'a pas 30 ans, ses podcasts sont écoutés par une génération qui, souvent, n'a pas encore d'enfant et ne se pose pas trop de questions sur l'école inclusive... Sans l'avoir prémédité, elle fait, avec ce podcast, un énorme travail de sensibilisation auprès d'un public qui ne serait sûrement pas allé sur ce sujet du handicap et de l'inclusion scolaire. Et pour cela, on peut lui dire un énorme merci !

https://open.spotify.com/show/...

Il y a des vocations qui viennent de loin. 

Elisa Jolivet et Léa Guezais ne se connaissaient pas, il y a encore deux ans. L'une est "explosive" (selon ses propres  termes!), l'autre est plus posée, mais elles ont un point commun : toutes les deux ont un frère/une soeur, en situation de handicap. Toutes les deux ont vécu le quotidien compliqué d'une famille confrontée à la Trisomie 21 pour l'une, à une grave maladie cardiaque pour l'autre.

Toutes les deux ont vu leurs parents y laisser pas mal de plumes...

Quand on passe son enfance dans une fratrie touchée par le handicap, on peut légitimement avoir envie de mettre de mettre des distances en choisissant une voie professionnelle "plus légère". C'était ce qu'elles pensaient faire au départ.

"Je ne voulais pas travailler dans le monde du handicap" dit Elisa qui vit encore chez ses parents avec son frère Paul de 20 ans, trisomique. Et pourtant c'est elle qui, un jour où elle gardait son frère, s'est demandé pourquoi il n'existait pas de plateforme de baby-sitting pour ces familles à besoins particuliers.

L'idée a fait son chemin, le projet s'est lancé et Léa rejoint très vite Elisa dans l'entreprise.

Les entretiens avec les parents pour recueillir les besoins des familles, sont durs. C'est une maman qui leur dit qu'elle rêve juste, depuis 4 ans, d'aller prendre un café en terrasse à Paris. Une autre a dû chercher en urgence un foyer pour son fils car la famille implosait et son mari devenait violent vis à vis de l'adolescent...

"On sait qu'on n'est pas des sauveurs mais on veut faire quelque chose". Les deux jeunes femmes viennent de déposer les statuts de leur entreprise, Hapaulo ("Ha" pour "handicap" "paulo" pour Paul, le frère d'Elisa).

C'est une plateforme de mise en relation des familles, avec des baby-sitters ou autres intervenants, sensibilisés au handicap.

Les familles concernées sont dans les starting blocks pour s'inscrire, mais le défi à relever est de trouver suffisamment de professionnels prêts à offrir leurs services sur cette plateforme. 

Deux cents accompagnants ont déjà manifesté leur intérêt pour le projet.  L'objectif serait d'attirer  des étudiants des métiers du soin ou de l'éducation, souhaitant avoir une première expérience de terrain (et une rémunération) tout en bénéficiant d'un accompagnement.

Si vous connaissez des étudiants intéressés ou si vous avez des entrées dans les écoles/fac (de psycho, éduc spé, psychomot', etc...), n'hésitez pas à les contacter, elles sont en pleine recherche active.

Si tout va bien, la plateforme devrait voir le jour au premier trimestre 2023.

Pour suivre Léa et Elisa et les actualités d'Hapaulo : Hapaulo  Présentation | LinkedIn

Je n'ai pas pu retranscrire l'intégralité de nos deux heures de discussions, mais le récit de leur parcours de grandes soeurs m'a fait penser aux épisodes du podcast dédiés à la fratrie:

Tous pareils ou presque ! | Ep.6 - Frères et soeurs : comment trouver sa place ? (ausha.co)

J'ai lu cette semaine "Un enfant sans histoire", de Minh Tran Huy, journaliste et maman d'un petit garçon autiste âgé aujourd'hui de 8 ans.

Des livres-témoignages, il y en a beaucoup et la plupart racontent les moments difficiles mais aussi les magnifiques progrès obtenus après la mise en place d'une prise en charge adaptée et intensive.

La singularité de ce livre, c'est qu'au-delà du récit du parcours "classique" de ces parents, il raconte l'histoire d'un petit garçon qui ne progresse pas, ou très peu malgré les meilleures prises en charge possibles et les efforts acharnés de ses parents pour explorer toutes les pistes possibles.

Le petit Paul a été intégré au sein d'une des classes "soleil", il a bénéficié d'une prise en charge comportementale intensive, Min Tran Huy explique à quel point elle et son mari, ont suivi à la lettre les préconisations des meilleurs spécialistes et mis en place tout ce qui pouvait l'être pour faire progresser leur enfant. 

Et pourtant, à 7 ans, ce petit garçon ne communique qu'avec quelques pictos, il n'a quasiment aucune autonomie, pas de jeu, très peu d'interactions... Son âge développemental selon les spécialistes est de 18 mois.

Dans ce livre, Minh Tran Huy raconte le parcours harassant de tous ces parents, mais surtout son cheminement intime vers l'acceptation d'un avenir pour son enfant, qui ne sera pas celui des enfants "sortis" de l'autisme. Pour souligner cette réalité, elle alterne le récit de son parcours avec celui de Temple Grandin qui fait, au contraire, partie des personnes autistes qui ont pu s'insérer dans la Société.

La question posée en filigrane dans ce livre c'est : au-delà de la qualité de la prise en charge et de l'investissement des parents, qu'est-ce qui fait qu'un enfant va progresser de façon très significative, alors qu'un autre n'y parviendra pas...? 

Le sentiment d'impuissance et d'injustice est présent à chaque page de ce livre même si l'écriture est sobre et sans pathos. Les parents du petit garçon font, malgré tout, le choix de parier sur la vie, même quand ils ont l'impression qu'il n'y a plus d'espoir.

Un choix qui me fait penser à la phrase de  Martin Luther King : "Si l'on m'annonçait que la fin du monde est pour demain, je planterai quand même un pommier..."

Les badges de Mayliss Loiseau (Cf. la dernière newsletter) sont sortis et sont très jolis! Vous les retrouverez sur son site (mayliss loiseau – Apprendre Avec Autisme).

Jenny, maman de Charles, un jeune adulte autiste a réagi à la dernière newsletter sur cette question de "l'affichage" :

"je voudrais rebondir sur l'histoire de Mayliss. Elle a fait écho à un dispositif que j'ai mis en place cet été avec Charles. Charles fait chaque semaine le trajet entre notre domicile et l'ESAT où il travaille, seul, au volant de sa voiture sans permis. De nombreuses fois, il a exprimé le fait qu'il ressent l'exaspération des conducteurs derrière lui qui s'impatientent en collant le pare-choc de sa voiture ou qui le doublent en lui montrant bien qu'il roule trop lentement. Lorsque Charles conduit il a donc tendance à serrer le côté droit de la chaussée pour ne pas "gêner" comme il dit, et laisser les autres automobilistes le dépasser. 

Je me suis demandée ce que je pouvais faire pour l'aider. J'ai pensé alors que cela pourrait être une idée d'afficher sur la vitre arrière de sa voiture un disque visible (comme le A des jeunes conducteurs) indiquant son handicap mental. Afficher le handicap.....Bonne ou mauvaise idée....Je n'en sais rien.... N'est-ce pas réduire l'identité de la personne à son handicap? Mais faut-il aussi ignorer ces comportements insupportables qui sont source de stress pour Charles? Avec son accord, j'ai apposé sur le pare-brise arrière de sa voiture une petite pancarte sur laquelle est imprimée le symbole du handicap mental suivi du message "la vie appartient à ceux qui lèvent le pied". Si cela peut amener ne serait-ce que quelques automobilistes à plus de patience ce sera déjà positif. Comme le dit Mayliss, si cela peut soutenir l'estime et la confiance de Charles en lui-même alors peut-être faut-il avoir moins peur de l'idée d'une étiquette qui fige le statut de la personne....."

Merci à elle pour ce retour, et continuez, si vous le souhaitez, à m'envoyer vos réactions, questions, suggestions...

A très bientôt,

Stéphanie

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