"On a énormément de situations, notamment en situation primaire, où on donne 1, 2, 3, 4 médicaments à des gens dont la probabilité qu'ils aient un bénéfice de ce médicament au bout de 10 ans est au mieux de 1%, quelques fois même simplement un pour mille. Mais on ne se pose pas tellement la question de ce niveau de rentabilité de ce niveau de bénéfice en tant que prescripteur. À partir du moment où il est prouvé sur des dizaines de milliers de patients, tu prouves que des bénéfices très faibles sont significatifs au sens statistique. C'est-à-dire qu'on est sûrs qu'ils existent. Par contre, quelle est leur pertinence pour un patient ? Ça c'est extraordinaire mais on se pose très peu, voire jamais, la question. En prévention primaire la décision n'est jamais partagée parce que les médecins ne font jamais l'effort de faire exprimer les préférences de l'individu qu'ils ont en face d'eux par rapport à cette dimension de la diminution de risque. Un patient qui a une probabilité de bénéficier du traitement de 1%, il y a beaucoup de patients qui ne prendraient pas le traitement s'ils le savaient. [...] On fait probablement plus de mal que de bien dans beaucoup de cas."
François Gueyffier - cardiologue, chercheur, et professeur de pharmacologie
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